Vincent Piguet, 51 ans, comédien et prof de chenille, nous raconte ses débuts sur scène et l’aspect physique de sa discipline.

« J’ai eu plusieurs vies avant d’être prof de chenille. Enfant, j’étais asthmatique, ce qui ne m’empêchait pas de jouer au foot. J’ai pratiqué alors que je n’avais une capacité pulmonaire que de 70 %. Adulte, je me suis installé au Gabon, où l’humidité me convenait bien. Elle semblait calmer mon asthme. Ça m’a permis de jouer avant-centre au Stade Gaulois de Libreville, quand mon boulot de torréfacteur de café m’en laissait le temps. J’ai passé huit ans en Afrique avant de revenir.

Au retour en France, j’étais divorcé et j’avais trois enfants. L’énergie du désespoir m’a poussé à répondre à une annonce pour écrire et jouer un premier one-man-show. Même si j’ai toujours été sportif, la scène me cassait physiquement. Le stress me contractait énormément. Si bien qu’au bout de deux sketches, j’étais lessivé. J’avais les épaules tendues. Impossible de me débloquer. Je me demandais comment faisaient les autres humoristes.

J’ai même essayé des techniques alternatives pour arriver à reprendre le contrôle de mon corps, comme de la déprogrammation cellulaire ou de la pensée positive. Finalement, je me suis dit que j’étais davantage un homme de troupe. Dans un groupe, mon corps n’était pas agité par toutes ces tensions.

Pendant ma courte carrière solo, j’ai écrit le sketch le Chenilliste. J’imaginais un prof de chenille qui créait la Chenille School Academy en inventant des gestes marrants. Il y a dix ans, j’ai joué Ladies Night, la pièce qui a été adaptée en film sous le titre The Full Monty. Il y avait des scènes de strip-tease, mais j’étais à l’aise avec ça. Je suis prêt à tout pour ambiancer les gens. Je me suis dit que la pièce pourrait aussi inspirer une série avec une équipe de bras cassés. Et là est revenue cette idée d’école de chenille.

« Je me suis rendu compte que piétiner en cadence pendant quatre heures avec les bras en l’air, c’est du sport » - Vincent Piguet

J’ai ouvert la Chenille School Academy pour de vrai en 2022. Pendant six mois, j’ai loué une salle à Paris tous les mardis... sans que personne ne vienne. (Rires.) Mon idée, c’était de développer des techniques inspirées par la natation synchronisée, et j’ai créé une discipline : la chenille synchronisée. Au même moment, on m’a appelé pour organiser un record du monde à Rouen. Là, je me suis rendu compte que piétiner en cadence pendant quatre heures avec les bras en l’air, c’est du sport. J’étais épuisé à la fin. Puis BFMTV a réalisé un reportage sur mon cours et quelque temps plus tard, il a commencé à se remplir.

Dans la chenille synchronisée, il y a les passes débiles (standard, casquette, cascade, moulinette...), mais aussi la cadence en levant les genoux en rythme sur la musique. C’est fatigant. Pour tenir longtemps, les bras doivent être fermes et les poignets souples. Il faut pouvoir amortir les poussées des personnes derrière et en même temps rester bien accroché à la personne devant soi. Casser une chenille, c’est la hantise du chenilliste.

Pendant mes cours, je suis une pile, je n’arrête pas. Sur une heure, on passe quarante-cinq minutes à danser. À force, ça m’a redessiné les mollets. La chenille, c’est physique et feel-good. C’est aussi le signe qu’on a besoin de se toucher en ce moment. Moi, j’aime me sentir avec les autres, sentir leur présence. En l’enseignant, j’ai découvert les vertus de cette discipline qui se rapproche du yoga du rire. D’un délire, c’est devenu quelque chose que je prends au premier degré. Et qui me fait du bien, tout simplement. »

Vincent Piguet, c’est...

  • 1,79 m pour 81 kg.
  • 18 ans de théâtre.
  • 4 623 chenillistes rassemblés à Lille le 2 septembre dernier, nouveau record du monde.
  • 3 passages dans La France a un incroyable talent, sur M6, où il co-anime désormais Le Juste Prix.
  • 4 millions de vues sur YouTube pour le clip de La chenille synchro.
  • 1 million de vues sur TikTok en vingt-quatre heures pour le premier « challenge chenille ».

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